Logo

A vous de choisir le désordre

Comme Danny Ocean et ses 11-12-13 comparses, Leo Pap/Ray Vernon (Giancarlo Esposito, le «Gus» de Breaking Bad) prépare un casse à 7 milliards de dollars avec sa bande de bras cassés.
Christophe Dutoit

Christophe Dutoit

14 février 2023 à 06:00

Mon gin, ma télé et moi

De Stanley Kubrick à Quentin Tarantino, ou plus récemment Rian Johnson, de nombreux réalisateurs ont joué avec les allées et venues temporelles. La série Kaleidoscope, sur Netflix, s’amuse de ces codes avec ses huit épisodes à voir – presque – dans l’ordre que vous désirez.

SÉRIE. Méfiez-vous, on va spoiler. C’est même le principe de Kaleidoscope, une série américaine en huit épisodes publiée depuis janvier sur Netflix. L’accroche: une bande de voyous à la petite semaine prépare le casse du siècle. Le truc: les épisodes, qui portent chacun le nom d’une couleur, peuvent se regarder dans n’importe quel ordre, soit environ 5000 possibilités. Mais, de l’avis général, on vous conseille quand même de terminer par l’épisode Blanc, qui raconte le jour du cambriolage et qui révèle – on ne vous en dira pas davantage – l’ultime volte-face.

Sinon, vous avez le choix et profitezen: vingt-quatre ans avant, sept ans avant, six semaines avant, trois semaines avant, cinq jours avant, le lendemain matin ou six mois plus tard. Qu’importe l’ordre d’apparition – chronologique, arc-en-ciel, aléatoire, à la Usual suspect – cette narration se veut non linéaire, bourrée de prémonitions et de flashbacks (c’est selon) et délicieusement envoûtante.

Il est vrai que son créateur Eric Garcia a été biberonné à l’histoire du cinéma. Il a évidemment revu L’ultime razzia (1956) de Stanley Kubrick et sa construction qui se joue de la chronologie. Et surtout Reservoir Dogs (1992) de Quentin Tarantino et sa virtuosité à évoquer l’avant et l’après d’un braquage sans jamais le montrer. Plus récemment, le jeune prodige Rian Johnson a usé de ce genre d’astuces pour A couteaux tirés et surtout Glass onion, avec une jouissance non feinte. Sans parler du sublime De beaux lendemains d’Atom Egoyan et ses multiples points de vue sur un même événement.

Pur produit du gros divertissement à l’américaine, Kaleidoscope ne boude pas ses références à la série Ocean’s et à ses cambriolages tous plus rocambolesques les uns que les autres. Ici, le casse est bien sûr irréaliste, les trucs pour y arriver sont tellement imprévisibles, tout comme les improbables renversements de situation. Mais là n’est pas l’essentiel.

Comme souvent dans les séries de cette durée (six heures au total), le scénario se permet de musarder sur ses personnages et d’approfondir leur psychologie. En creusant leur passé et leur mémoire, on apprend – plus ou moins vite, c’est selon – les liens qu’entretiennent les braqueurs. Et les envies de trahison et de vengeance qui les animent à peu près tous. Et, comme il est souvent de mise depuis Game of thrones, la plupart des protagonistes meurent à la fin (ou au deuxième épisode, suivant l’ordre dans lequel vous les regardez). Voilà, on a spoilé.

Les fans de Breaking Bad retrouveront avec délectation «Gus» dans le rôle principal de Leo Pap/Ray Vernon, le cerveau vieillissant de la clique. Ils découvriront la sublime Tatiana Gabrielle Hobson dans le rôle de sa fille, mesquine à souhait. Comme souvent, le méchant est charmant (Rufus Sewell), l’agente du FBI est rattrapée par son passé (Niousha Noor) et le couple de vauriens est carrément pathétique (Rosaline Elbay et Jai Courtney). Et la fin, pour autant que vous choisissiez bien, est tellement satisfaisante. CHRISTOPHE DUTOIT

Kaleidoscope, d’Eric Garcia, huit épisodes à regarder dans l’ordre que vous désirez, Netflix

Ce contenu provient de notre ancien site web. Il est possible que sa mise en page ne soit pas idéale. En savoir plus