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Gruyère

Corbières, ce «pays» qui fait de la résistance

La base de pompiers de Corbières est condamnée dans la nouvelle organisation du Bataillon Sud. Le syndic Gabriel Kolly estime que le village n’est plus correctement couvert en cas d’incendie. ANTOINE VULLIOUD
Philippe Huwiler

Philippe Huwiler

9 février 2023 à 06:00

Corbières ne revotera pas sur les statuts de l’Association Secours Sud fribourgeois, que l’assemblée communale avait refusés en décembre 2022. Le village s’estime lésé par la fermeture de sa base de départ des pompiers. Le Conseil d’Etat devrait contraindre la commune à rentrer dans le rang.

PHILIPPE HUWILER

DÉFENSE INCENDIE. Non, c’est non! Le syndic de Corbières Gabriel Kolly est opposé depuis le début à la nouvelle Loi sur la défense incendie et les secours (LDIS). «Je suis tout à fait à l’aise parce que j’étais le seul à avoir voté contre ce projet au Grand Conseil (n.d.l.r.: en mars 2021).» Aujourd’hui, il persiste et signe: il ne convoquera pas une assemblée communale pour revoter sur les statuts de l’association. Le 12 décembre 2022, les citoyens de Corbières avaient nettement refusé d’adhérer à l’organisation du Secours Sud fribourgeois… Le Conseil d’Etat avait alors prolongé le délai jusqu’au 31 mars 2023 pour permettre aux communes de reconvoquer une assemblée (La Gruyère du 24 décembre 2022).

La base de la discorde

Ce qui froisse surtout Gabriel Kolly, c’est la disparition de la base de Corbières. «On ne sera plus couverts. Car suivant d’où on part dans le village aux heures de pointe, on n’est pas à sept minutes de La Roche, la base de départ la plus proche.»

D’une manière plus générale, il qualifie cette LDIS de «complètement idiote. On centralise des choses qui marchaient bien. On perd de la proximité. On passe de quelque chose qui ne nous coûtait rien à un système qui pèse 1,3 million de francs de salaires par année, au bas mot. Cela représente plus de 100 000 francs en moyenne par équivalent pleintemps. C’est beaucoup trop cher.»

La question du recrutement inquiète également Gabriel Kolly. «Avec moins de bases de départ, les pompiers sont davantage sollicités. Si un sapeur doit partir toutes les semaines en intervention, il faut trouver un employeur qui soit d’accord de le laisser aller.»

Questions sans réponse

Aux demandes officielles d’explications sur la couverture ou les classes salariales de la part de Corbières, le syndic affirme n’avoir reçu aucune réponse. «Ça, ce n’est déjà pas du boulot», tonne Gabriel Kolly.

Le préfet de la Veveyse François Genoud, également président du comité de direction de l’Association Secours Sud fribourgeois, reconnaît qu’il y a eu un «problème de transmission de mails». Avant de pondérer: «Entre mars 2022 et la fin de l’année, nous avons dû répondre à de nombreuses questions. Ils auraient dû nous renvoyer les leurs. Il n’y avait pas que Corbières à convaincre… Mais est-ce possible de convaincre Corbières?» s’interroge le préfet veveysan.

Car Corbières a déjà connu un précédent en 2018. La commune a été contrainte par le Tribunal fédéral à intégrer malgré elle le triage forestier Berra-Gibloux.

Dans le canton, peu de communes refusent d’intégrer la nouvelle organisation de défense incendie (lire ci-dessous). Mais selon Gabriel Kolly, certaines ont voté oui par défaut. «Plusieurs de mes collègues syndics ne sont pas convaincus… Ils ont accepté parce qu’il y avait une pression de la préfecture et de l’ECAB. A Corbières, nous avons dit non, parce qu’on n’a pas eu de réponses à nos questions. Et on paie plus cher pour moins de prestations», conclut le syndic. Celui-ci attend maintenant la réponse du Conseil d’Etat. «Nous prendrons acte et nous étudierons toutes les possibilités qui s’offrent à nous.» ■


L’Etat va contraindre les récalcitrants

PROCÉDURE. Dans le canton, trois communes refuseraient d’adhérer à la nouvelle organisation de la défense incendie: Corbières, Prévondavaux et Granges-Paccot. «Attalens a décidé de remettre ce point à l’ordre du jour de la prochaine séance de son Conseil général le 14 mars prochain», précise le préfet de la Veveyse également président du comité de direction de l’Association Secours Sud fribourgeois.

Le Conseil d’Etat doit maintenant trouver une solution plus contraignante, comme le précise Romain Collaud, directeur de la sécurité, de la justice et du sport.

Allez-vous appliquer l’article 110 de la Loi sur les communes pour obliger les récalcitrants à intégrer les associations?

Romain Collaud: On n’a pas le choix. Du moment que les communes refusent de faire revoter les statuts, on a l’obligation de les contraindre. On ne peut pas prendre en otage plus de 120 communes pour trois ou quatre qui ne veulent pas adhérer.

Corbières craint de n’être plus couverte en cas d’abandon de sa base de départ?

Quand on veut tuer son chien, on dit qu’il a la galle. C’est son point de vue, mais je ne peux pas être d’accord avec ça. Les temps d’intervention ont été calculés et une cartographie précise a été faite par l’ECAB et les spécialistes de la défense incendie.

Pourriez-vous accepter la création d’un corps de sapeurs communal à Corbières par exemple?

Joker (rires). Non, sérieusement. Aujourd’hui ce serait complètement illogique d’avoir des enclaves de pompiers à gauche, à droite. La loi a été acceptée par plus de 99% des députés. On ne fait qu’appliquer ce qui a été voté par le Grand Conseil. Le Conseil d’Etat a laissé le temps aux communes de faire le nécessaire. Aujourd’hui, si elles ne veulent toujours pas revoter, malgré les clarifications, le Gouvernement devra les contraindre à rejoindre les associations. PH

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