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«Trouver l’équilibre entre se faire plaisir et se dépasser»

La vingtaine de musiciens de l’Orchestre de la ville de Bulle se produira ce soir à la chapelle des Capucins sous la direction d’Olivier Murith. JEAN-BAPTISTE MOREL
Christophe Dutoit

Christophe Dutoit

28 janvier 2023 à 06:00

Ce samedi soir, l’Orchestre de la ville de Bulle entame les festivités de son 90e anniversaire avec un premier concert à la chapelle Notre-Dame de Compassion.

CHRISTOPHE DUTOIT

ANNIVERSAIRE. Ce soir, Bach, Vivaldi, Haendel, Barber et quelques autres résonneront dans la chapelle Notre-Dame de Compassion à l’occasion du premier concert qui marque les 90 ans de l’Orchestre de la ville de Bulle. Présentation avec son directeur Olivier Murith et son président-altiste Grégoire Kubski.

Pratiquer un instrument à cordes n’est pas chose aisée. Comment se passe la relève au sein de l’Orchestre de la ville de Bulle?

Grégoire Kubski: Nous menons une véritable réflexion sur ce sujet. Aujourd’hui, les fanfares sont très présentes dans les villages et elles recrutent beaucoup de jeunes. En parallèle, un certain nombre d’entre eux commencent le violon ou le violoncelle au Conservatoire, qui a formé un petit orchestre sous la direction de Cyrille Pürro. Tous les deux ans, nous organisons un concert avec lui, en alternance avec celui du CO, qui représente l’étape suivante. On essaie de garder les jeunes à la période cruciale de l’adolescence, à un moment où ils ont tendance à arrêter leur instrument. Mine de rien, il faut du temps avant d’obtenir un son propre avec un instrument à cordes. Ce qui est parfois frustrant, aussi bien pour l’élève que pour les parents. Donner aux jeunes l’envie de l’orchestre est un vrai défi. Mais on y prend vite du plaisir. L’aspect intergénérationnel est important pour nous. Certains commencent à la fin du CO, d’autres restent longtemps. Pour ces concerts anniversaires, nous avons invité d’anciens membres à nous rejoindre. Par exemple, Bernard Pasquier, président dans les années 1970, fait son retour à plus de 80 ans.

Aujourd’hui, où se situe l’Orchestre de la ville de Bulle en terme musical?

Olivier Murith: Des orchestres comme le nôtre, il en existe une poignée dans le canton. Du coup, il n’y a pas de catégorie à proprement parler. La difficulté, j’essaie de l’adapter en fonction de l’effectif. Ma philosophie est de jouer des pièces pas trop difficiles, mais un peu quand même. Pour avoir cette satisfaction d’y être arrivés. Je cherche l’équilibre entre se faire plaisir et se dépasser.

Comment choisissez-vous votre répertoire? O.M.: L’effectif et la difficulté déterminent notre choix. On a la chance d’avoir un énorme répertoire à notre disposition, exception faite de la musique du XIXe siècle, qui est la plus difficile. On peut chercher autant du côté des débuts du baroque que du XXIe siècle, de Corelli à Honegger, en passant par des compositeurs de la région. A chaque concert, j’essaie de glisser une œuvre moderne ou contemporaine. Pour l’occasion, des musiciens ont proposé des pièces de Barber, de Schönberg ou de Jenkins. C’est la preuve que cette musique plaît.

En vingt-trois ans à la tête de l’Orchestre, comment l’avez-vous vu évoluer?

O.M.: Avec bonheur! Humainement, j’ai le même plaisir de venir tous les jeudis à la répétition. Tout le monde s’est toujours très bien entendu. Musicalement, j’ai vu des changements au gré des effectifs. Il suffit que trois bons musiciens partent pour remettre l’ouvrage sur le métier. Mais, au fil de ces années, j’ai l’impression que le niveau est meilleur.

G.K: C’est l’écho que l’on entend des anciens musiciens. Sans flagornerie, ils nous parlent d’une réelle progression, essentiellement due au travail rigoureux d’Olivier. Sans qu’il soit dictatorial, comme ça a pu l’être à une certaine période.

Tout au long de l’année, on ressent votre plaisir à collaborer avec les chœurs de la région…

O.M.: Oui, j’aime beaucoup que l’orchestre soit un membre à part entière de la vie musicale de la Gruyère. A plusieurs reprises, on a accompagné La Cécilienne de La Tourde-Trême ou les chœurs de Gonzague Monney. Quand un chef de chœur me contacte, je dis toujours un oui de principe. Ensuite, on discute. D’ailleurs, je relance volontiers un appel: nous sommes ouverts à toute collaboration, dans la mesure de nos moyens. ■


Un orchestre d’abord en mode symphonique

UN PEU D’HISTOIRE. L’Orchestre de la ville de Bulle fête officiellement ses 90 ans cette année. «Il existait déjà une “société d’orchestre de Bulle” dans les années 1870, raconte Grégoire Kubski, altiste et président de l’ensemble. Dans les archives du Musée gruérien, on a retrouvé des partitions datées de cette époque-là. Durant une longue période, les liens étaient encore assez flottants avec le Corps de musique. En 1933, l’Orchestre se fonde officiellement.» Dans ses statuts, imprimés en 1936, on apprend qu’il fallait d’ailleurs montrer patte blanche pour y entrer. «“Pour être reçu membre actif, il faut en outre subir un examen auprès du directeur qui donne son préavis.” C’est assez marrant, il faut l’avouer.»

Au côté des fanfares et chœurs actifs depuis des lustres dans la région, l’Orchestre de la ville de Bulle peut, lui aussi, se targuer d’une longue tradition. «Même si son équilibre a toujours été assez délicat, note le Bullois, qui a retrouvé de vieux procès-verbaux manuscrits. Trois sujets reviennent sans cesse lors des assemblées générales: la difficulté des pièces jouées, l’assiduité des cuivres et des vents aux répétitions et… la perte d’instruments, dont une fameuse contrebasse, égarée puis retrouvée à l’arrière-scène de l’Hôtel de Ville.» «Durant longtemps, l’orchestre est encore symphonique, avec des hautbois, des vents et Me Steinauer – le président – aux timbales», note Grégoire Kubski. A partir des années 1970, il se concentre sur les cordes. «Tout en gardant la possibilité – ce que nous faisons une fois par année – de donner un concert en mode symphonique avec des cuivres, des vents et des percussions.» En 1967, le président insistait déjà sur «le rôle social de l’orchestre pour la création de liens d’amitié entre les membres.» Grégoire Kubski sourit: «Cette idée revient souvent. L’Orchestre est une grande famille, avec des fratries très présentes, encore aujourd’hui.» Et en pleine forme vers son centenaire. CD

Bulle, chapelle Notre-Dame de Compassion, samedi, 20 h, www.orchestredebulle.ch

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